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Veille réglementaire Amélioration des pratiques
Publié le 27 décembre 2023 Modifié le 27 décembre 2023
Temps de lecture : 13 minutes

Veille législative et réglementaire protection sociale – novembre 2023

Chaque mois, nous effectuons une veille du journal officiel et du Bulletin officiel. Vous trouverez ici celle du mois de novembre 2023.

Fonction publique

Placement en CITIS à titre provisoire et conditions spécifiques de retrait de cette décision

Dans les faits de l’affaire jugée au Conseil d’Etat le 3 novembre 2023 et portant le numéro 465818, une fonctionnaire territoriale a été victime d’un accident reconnu imputable au service puis consolidée. Ensuite, elle a été placée à nouveau en arrêt de maladie et a demandé la reconnaissance d’une rechute en lien avec l’accident de service évoqué ci-dessus pour ces arrêts. La collectivité a alors placé l’agent en congé pour invalidité temporaire imputable au service (CITIS) pour une durée initiale d’un mois, prolongée par plusieurs décisions successives. Cependant et par la suite, le conseil médical a émis un avis défavorable sur l’imputabilité au service des arrêts de travail concernés. Par conséquent, la collectivité a retiré les décisions ayant précédemment placé l’agent en CITIS pour la placer en congé de maladie ordinaire. L’agent a donc saisi le juge.

Pour mémoire, il ressort du décret n°87-602 du 30 juillet 1987 que pour se prononcer sur l’imputabilité au service de l’accident, l’autorité territoriale dispose d’un délai d’un mois à compter de la date de réception de la déclaration d’accident complète. Un délai supplémentaire de trois mois peut éventuellement s’ajouter à ces délais en cas d’examen par le médecin agréé ou de saisine du conseil médical.

Néanmoins, il ressort également de l’article L. 242-1 du code des relations entre le public et l’administration, que cette dernière ne peut abroger ou retirer une décision créatrice de droits de sa propre initiative ou sur la demande d’un tiers que si elle est illégale et si l’abrogation ou le retrait intervient dans le délai de quatre mois suivant la prise de cette décision.

Cependant et lorsque cette autorité n’est pas en mesure d’instruire la demande de l’agent dans les délais impartis, l’agent peut être placé en CITIS à titre provisoire pour la durée d’incapacité de travail indiquée sur le certificat médical joint à la déclaration d’accident. La décision de placement en CITIS provisoire doit préciser qu’elle peut être retirée dans les conditions prévues au décret du 30 juillet 1987.

Ainsi et dans ces conditions, une fois l’instruction achevée, l’autorité territoriale se prononce sur l’imputabilité au service et, le cas échéant, place le fonctionnaire en CITIS pour la durée de l’arrêt de travail. En revanche, lorsque l’administration ne constate pas l’imputabilité au service, elle retire sa décision de placement à titre provisoire en CITIS et procède aux mesures nécessaires au reversement des sommes indûment versées.

Il en ressort donc qu’un tel placement en CITIS à titre provisoire ne vaut pas reconnaissance d’imputabilité, et peut donc être retiré si, au terme de l’instruction de la demande de l’agent, cette imputabilité n’est pas reconnue.

Concernant l’affaire jugée le 3 novembre 2023, les décisions de l’administration plaçant l’agent en CITIS ne précisaient pas qu’elles étaient délivrées à titre provisoire et qu’elles pourraient être retirées dans les conditions prévues par le décret précité. Dès lors, les décisions concernées ne pouvaient être regardées comme étant provisoires mais plutôt comme reconnaissant l’imputabilité au service de la rechute. Par conséquent, l’administration ne pouvait légalement, plus de quatre mois après cette décision créatrice de droits et en l’absence de fraude, remettre en cause l’imputabilité ainsi reconnue au seul motif que la commune refusait de reconnaitre l’imputabilité au service de cette rechute.

La maladie ne fait pas obstacle à l’exécution d’une exclusion temporaire de fonctions d’un agent public

(Conseil d’Etat, 03-07-2023, n° 459472)

Le requérant avait, d’abord, été sanctionné d’une exclusion temporaire de fonctions d’une durée de deux ans. Le rectorat de Lyon dont il dépendait avait, ensuite, décidé de suspendre le versement de sa rémunération en conséquence de la susdite sanction. Ces mesures ayant été prises pendant le congé de maladie de l’agent, ce dernier a fait valoir cette circonstance pour contester la privation de sa rémunération devant le tribunal administratif de Lyon, lequel a rejeté ses conclusions à fin d’annulation. La cour administrative d’appel de Lyon ayant ensuite confirmé cette solution, l’intéressé a saisi le Conseil d’État qui a, dès lors, été appelé à trancher la question de savoir si la sanction d’exclusion temporaire de fonctions peut produire ses effets alors que l’agent concerné est en congé de maladie ; ce à quoi il a répondu affirmativement.

Bien avant la décision ici commentée, il avait été posé que le congé de maladie, quelle qu’en soit la durée, n’interdit ni l’engagement de poursuites disciplinaires à l’encontre de l’agent en bénéficiant (CE 26 juill. 1978, n° 05625, Cheval, Lebon T. ; CE 11 mai 1979, n° 02499, Dupouy, Lebon T. ; CE 29 sept. 1982, n° 11097, Mme Vernel, Lebon ), ni le prononcé d’une sanction à son égard (CE 3 avr. 1991, n° 78931 ). Allant plus loin, le Conseil d’État a considéré que « la circonstance qu’un agent soit placé en congé pour maladie ne fait pas obstacle […] à l’entrée en vigueur d’une décision de révocation » (CE 6 juill. 2016, nos 392728 et 394484, Lebon T. ; AJDA 2016. 1427 ; AJFP 2017. 52, et les obs. ). Cette solution a, par la suite, été étendue à la mise à la retraite d’office (CE 13 juill. 2022, n° 461914 ) ainsi qu’à une sanction impliquant une radiation des cadres (CE 6 déc. 2022, n° 465627 ). Ces trois mesures, outre leur caractère répressif, ont en commun de rompre définitivement le lien existant entre l’agent et son administration et, en conséquence, de lui faire perdre les droits attachés à son statut.

On comprendra donc les hésitations jurisprudentielles passées en ce qui concerne l’exclusion temporaire de fonctions, qui n’a pas la même implication puisque qu’elle n’éloigne que momentanément l’agent du service.

Par exemple, la cour administrative d’appel de Marseille, a estimé que « le placement d’un fonctionnaire en congé de maladie le fait bénéficier du régime de rémunération attaché à cette situation et fait donc obstacle à ce qu’il exécute pendant son congé de maladie une sanction disciplinaire prononcée à son encontre » (15 oct. 2020, n° 19MA04416), tandis que, pour la cour administrative d’appel de Paris, un agent ne peut utilement se prévaloir de ce qu’il est en congé de maladie, pendant la période de son exclusion, pour conserver sa rémunération (4 déc. 2007, n° 06PA02390). C’est d’ailleurs cette position qu’a adoptée la cour administrative de Lyon le14 octobre 2021, en jugeant que le congé de maladie ne s’oppose pas à l’entrée en vigueur d’une exclusion temporaire de fonctions, et c’est justement cet arrêt (n° 20LY02243), qui a permis à la Haute juridiction administrative de clore les débats, le 3 juillet 2023.

Dans un premier temps, elle rappelle, dans sa décision, que les procédures disciplinaire et de mise en congé de maladie sont « distinctes et indépendantes » et que la circonstance qu’un agent est placé en congé de maladie ne s’oppose pas à ce qu’il fasse l’objet d’une action disciplinaire (CE 13 mai 1992, n° 106098 ; CE 23 févr. 2022, n° 45486). Elle indique, en outre, que si une sanction, quelle qu’elle soit, lui est infligée, le congé de maladie n’est pas de nature à retarder son entrée en vigueur.

Dans un second temps, le Conseil d’État reprend les règles suivantes. Premièrement, les agents publics sont rémunérés en contrepartie d’un service fait (désormais, CGFP, art. L. 115-1 ). Deuxièmement, un fonctionnaire en activité a droit à des congés de maladie rémunérés quand la maladie qu’il présente est dûment constatée et le met dans l’impossibilité d’exercer ses fonctions (désormais, CGFP, art. L. 822-1 s.). Pour autant, le Conseil confirme que ces dispositions ont « pour seul objet de compenser la perte de rémunération due à la maladie », en dérogation au principe du droit à rémunération contre service fait, et qu’elles ne peuvent être regardées comme accordant des droits à rémunération supérieurs à ceux dont le fonctionnaire aurait bénéficié s’il n’avait pas été en congé de maladie (CE 8 oct. 2012, n° 346979, Montor, Lebon T. ; AJDA 2012. 1928 ; AJCT 2013. 106, obs. D. Krust ). Troisièmement, la sanction d’exclusion temporaire de fonctions est privative de toute rémunération (aujourd’hui, pour les fonctionnaires, CGFP, art. L. 533-3 , la règle étant la même pour les contractuels). De là, le Conseil conclut que l’agent qui fait l’objet d’une exclusion temporaire de fonctions ne saurait, durant cette période, conserver le bénéfice de sa rémunération à raison de son placement en congé de maladie.

Autrement dit, le congé de maladie ne prime pas sur le disciplinaire et il n’y a pas lieu de tenir compte de l’antériorité de ce congé par rapport au prononcé de la sanction pour reporter, le cas échéant, sa prise d’effet. La chronologie n’importe pas. Il est également notable que la solution est différente lorsque la mesure administrative entraînant l’absence de service fait consister en une suspension de fonctions (avec ou sans maintien d’éléments de rémunération). En effet, si cette décision est prise alors que l’agent est déjà en congé de maladie, elle ne peut légalement entrer en vigueur avant le terme de celui-ci (s’agissant de la suspension d’un agent qui n’avait pas satisfait à l’obligation vaccinale contre la covid-19 ,CE 2 mars 2022, n° 458353 , Centre hospitalier Bretagne sud, Lebon T. ; AJDA 2022. 487 ; ibid. 1175 , note C. Chauvet ; AJFP 2022. 277, et les obs. ; CE 11 mai 2022, n° 459011 , Centre hospitalier de l’agglomération montargoise, Lebon T ; AJDA 2022. 1010 ; AJFP 2022. 278, et les obs. ; s’agissant de la suspension prononcée à titre conservatoire, en cas de présomption de faute grave, CE 29 oct. 1969, n° 72791, Cne de Labeuvrière, Lebon ; CE 31 mars 2017, n° 388109, Lebon T. ; AJDA 2017. 713 ; AJCT 2017. 467, obs. A. Aveline et N. Kaczmarczyk ). Il est aussi constant que si l’agent est suspendu, sa suspension prend nécessairement fin avec son placement en congé de maladie de droit (CE 26 juill. 2011, n° 343837, Triquenaux, Lebon T. ; AJDA 2011. 1600 ; AJFP 2011. 361, et les obs. , jugeant qu’ « en plaçant ce fonctionnaire en congé de maladie ou de longue maladie, l’autorité compétente met nécessairement fin à la mesure de suspension, sans préjudice de la possibilité pour elle de la décider à nouveau à l’issue du congé si les conditions prévues […] demeurent remplies »).

Décret n°2023-1006 du 31 octobre 2023 portant création d’une prime de pouvoir d’achat exceptionnelle pour certains agents publics de la fonction publique territoriale

Le récent décret n°2023-1006 du 31 octobre 2023 a été publié au Journal officiel 1 le 1er novembre 2023 et celui-ci était très attendu par les agents publics de la fonction publique territoriale. En effet, il instaure une prime de pouvoir d’achat exceptionnelle au bénéfice de certains d’entre eux, afin de les soutenir face à l’inflation et leur permettre de faire face à la perte du pouvoir d’achat.

Cette nouvelle mesure s’inscrit dans une continuité règlementaire logique. Elle fait suite à la publication du décret n°2023-702 du 31 juillet 2023 2, prévoyant cette même prime mais au bénéfice de certains agents publics civils de la fonction publique de l’Etat et de la fonction publique hospitalière, ainsi que pour les militaires. Par conséquent, ce nouveau décret permet une certaine uniformisation des bénéficiaires de cette prime, étant donné que les trois versants de la fonction publique sont désormais concernés.

Toutefois, un point a déjà suscité débat 3 : il s’agit du caractère facultatif de l’attribution de cette prime. En effet, eu égard au principe de libre administration des collectivités territoriales 4, une telle attribution est soumise à l’approbation de l’organe délibérant de la collectivité territoriale, de l’établissement public ou du groupement d’intérêt public, après avis du comité social territorial compétent (CST) 5. L’uniformisation évoquée et la parité de cette mesure entre les différents versants de la fonction publique ne semblent donc pas totales.

Concernant les bénéficiaires, sont éligibles à cette prime les fonctionnaires titulaires et stagiaires et les contractuels de droit public de la fonction publique territoriale, les assistants maternels et les assistants familiaux. Le sont également les agents publics de l’Etat et hospitaliers détachés au sein de la fonction publique territoriale 6. A contrario, sont exclus de son bénéfice les agents publics éligibles à la prime de partage de la valeur, les élèves et étudiants en formation en milieu professionnel ou en stage avec lesquels les employeurs publics territoriaux sont liés par une convention de stage 7, ainsi que les agents contractuels de droit privé, les vacataires, les apprentis et les collaborateurs occasionnels du service public.

Trois conditions cumulatives 8 sont nécessaires au bénéfice de cette prime. Tout d’abord, il faut avoir été nommé ou recruté par un employeur public avant le 1er janvier 2023 9. Puis, être employé et rémunéré par ce dernier. Enfin, il faut avoir perçu une rémunération brute inférieure ou égale à 39000 euros au titre de la période courant du 1er juillet 2022 au 30 juin 2023. La rémunération brute 10 correspond à la contribution sociale de laquelle sont déduits les éléments suivants de rémunération, si versés durant la période précitée : l’indemnité de garantie individuelle de pouvoir d’achat (GIPA) 11, les éléments de rémunération 12 versés au titre des heures supplémentaires ou du temps de travail additionnel effectif accomplis (etc.), dans la limite du plafond de 7 500 € 13.
Le montant de la prime est déterminé par l’organe délibérant, mais dans la limite d’un certain plafond, en fonction de la rémunération brute perçue au titre de la période courant du 1er juillet 2022 au 30 juin 2023. Celui-ci varie de 300 € à 800 € selon la tranche. A noter que ce montant est réduit à proportion de la quotité de travail et de la durée d’emploi sur cette période 14.

Par ailleurs, le décret précise les modalités de versement de la prime lorsque l’agent public a été employé par plusieurs employeurs publics 15.

En outre, cette prime est cumulable avec toute autre prime et indemnité perçue par l’agent, à l’exception de la prime prévue par le décret du 31 juillet 2023 susvisé 16. Cette prime peut également être versée en une ou plusieurs fractions, avant le 30 juin 2024 17, contrairement aux agents publics d’Etat et hospitaliers, qui bénéficient d’un versement unique 18.

Un suivi 19 de la mise en œuvre de cette prime sera présenté, en 2025, au Conseil supérieur de la fonction publique territoriale sur la base d’un échantillon représentatif des collectivités.

Marchés publics

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Commande publique : nouveaux seuils de procédure formalisée au 1er janvier 2024

Publié le 28 novembre 2023 – Direction de l’information légale et administrative (Première ministre)

Au 1er janvier 2024, les seuils de procédure formalisée appliqués aux marchés publics évoluent. Ils seront appliqués pour les années 2024 et 2025.

Pour rappel, la procédure mise en œuvre dépend de la valeur estimée du marché public et de la fonction de l’organisme public avec lequel le marché est passé. Lorsque la valeur du marché est supérieure ou égale aux seuils européens, la procédure dite formalisée est appliquée.

Ces seuils évoluent au 1er janvier 2024. Ils sont révisés tous les 2 ans afin de prendre en compte l’évolution monétaire des Etats signataires.

Voici les seuils publiés au Journal officiel de l’Union européenne applicables pour la période 2024-2025 :

seuils Journal officiel de l'Union européenne applicables pour la période 2024-2025

1 Applicable dès le 2 novembre 2023
2 Décret n° 2023-702 du 31 juillet 2023 portant création d’une prime de pouvoir d’achat exceptionnelle pour certains agents publics civils de la fonction publique de l’Etat et de la fonction publique hospitalière ainsi que pour les militaires
3 « Prime de pouvoir d’achat à Châtellerault : le coup de pression de la CGT », Journal numérique La Nouvelle République (10/11/23)
4 Article L. 1111-1 du Code général des collectivités territoriales
5 Article 1er
6 Article 2
7 Article 1er
8 Article 2
9 Les agents publics de l’Etat et hospitaliers détachés au sein de la fonction publique territoriale sont éligibles à la prime en tenant compte de l’ancienneté acquise dans l’ensemble de la fonction publique.
10 Article 3
11 Décret n°2008-539 du 6 juin 2008 modifié relatif à l’instauration d’une indemnité dite de garantie individuelle du pouvoir d’achat ; article 1er
12 Décret n° 2019-133 du 25 février 2019 modifié portant application aux agents publics de la réduction de cotisations salariales et de l’exonération d’impôt sur le revenu au titre des rémunérations des heures supplémentaires ou du temps de travail additionnel effectif ; article 1er
13 Article 81 quater du Code général des impôts
14 Article 5
15 Article 6
16 Article 8
17 Article 7
18 Article 5 du Décret du 31 juillet 2023
19 Article 9

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