Actualité jurisprudentielle en psychiatrie
Les Experts Relyens se sont penchés sur une actualité jurisprudentielle en psychiatrie : la formalisation de la décision d’admission en soins sans consentement et les soins sans consentement sur demande d’un tiers (SDT).
Formalisation de la décision d’admission en soins sans consentement
La décision d’admission en soins sans consentement ne peut être différée au-delà du temps strictement nécessaire à la mise en œuvre de la procédure préalable à son intervention.
Cour Administrative d’Appel de Bordeaux 10 novembre 2015
N°14BX01260
Cour de Cassation 11 juillet 2016 avis N°16008
Qu’il s’agisse de soins sans consentement sur décision du directeur ou de soins sans consentement sur décision du Préfet, la formalisation de la décision d’admission s’impose.
Or, bien qu’elle ne soit réglementairement enfermée dans aucun délai, la formalisation de cette décision doit intervenir au plus tôt dès lors que les mesures préparatoires ont été accomplies.
Par deux décisions concernant respectivement une admission sur décision du directeur et une admission sur décision du Préfet, la cour administrative d’appel de Bordeaux et la cour de cassation ont sanctionné des mesures de soins sans consentement au motif que la formalisation de la décision avait été différée sans raison valable.
Ainsi, une fois le patient accueilli au sein de l’établissement, la décision formelle d’admission « ne peut être retardée au-delà du temps strictement nécessaire à la mise en œuvre de la procédure préalable à son intervention » (1) (certificats médicaux, demande du tiers…).
La Cour de Cassation apporte, à ce titre, une précision essentielle d’un point de vue opérationnel : ce différé « ne saurait excéder quelques heures » (2).
Au-delà de « ce bref délai », la décision est irrégulière et, par là même, susceptible d’être annulée.
Références
(1) Cour Administrative d’Appel de Bordeaux 10 novembre 2015 N°14BX01260
(2) Cour de Cassation 11 juillet 2016 avis N°16008
Soins sans consentement sur demande d’un tiers (SDT)
Le fait d’être voisin, même depuis 35 ans, ne donne pas, en soi, qualité pour agir dans l’intérêt du malade dès lors qu’aucun lien particulier n’est entretenu.
Tribunal de Grande Instance de Versailles, ordonnance du juge des libertés et de la détention du 19 août 2016.
Le JLD (3) a récemment rendu une ordonnance de mainlevée concernant une hospitalisation sans consentement sur décision du directeur au motif que le tiers ayant demandé l’admission n’avait pas qualité pour agir dans l’intérêt du malade.
Pour rappel, l’article L3212-1 du code de la santé publique impose, pour qu’une demande d’admission en soins psychiatriques à la demande d’un tiers soit valable, que cette dernière soit présentée « par un membre de la famille du malade ou par une personne justifiant de l’existence de relations avec le malade antérieures à la demande de soins et lui donnant qualité pour agir dans l’intérêt de celui-ci, à l’exclusion des personnels soignants exerçant dans l’établissement prenant en charge la personne malade. »
Dans l’affaire commentée, la procédure présentait le tiers comme une amie. Or, le patient a précisé qu’il s’agissait en réalité d’une voisine qu’il connaissait certes depuis 35 ans, mais avec laquelle il n’entretenait pas de liens particuliers.
La cour administrative d’appel de Paris avait déjà eu l’occasion, par un arrêt du 13 février 2008 (4), de rappeler qu’à défaut de précisions sur la nature des relations existant entre le tiers demandeur et le malade, « la qualité de voisine ne pouvait, à elle seule, permettre de la regarder comme ayant la qualité de personne susceptible d’agir dans l’intérêt du malade ».
L’établissement qui voit une admission sans consentement sur demande d’un tiers contestée en justice par le patient au motif que la demande était irrégulière n’a pas d’autre choix que de produire la demande litigieuse.
Conseil d’État 13 avril 2016 N°387922 et N°386059.
Alors même que l’identité du tiers demandeur d’une hospitalisation en psychiatrie sans consentement du patient est en principe couverte par le secret (5), le Conseil d’État s’est récemment positionné en faveur du contradictoire faisant primer ce dernier sur le secret des informations relatives aux tiers. Lorsque le juge est saisi d’une contestation portant sur la régularité d’une hospitalisation à la demande d’un tiers au motif que le tiers demandeur n’avait pas qualité pour agir dans l’intérêt du malade, il se doit de vérifier la demande litigieuse.
Dès lors, pour défendre la régularité de sa mesure, l’établissement d’accueil, responsable de l’admission contestée, est tenu de produire une copie de la demande d’hospitalisation formée par le tiers et ce, sans occultation de son identité.
Afin que le juge puisse faire état de ce document pour fonder sa décision, il doit nécessairement être communiqué, non seulement au juge lui-même, mais également, contradictoirement à l’ensemble des parties, et par conséquent au patient lui-même s’il s’agit du requérant.
Références
(3). Juge des Libertés et de la Détention,
(4). CAA Paris 13 février 2008 N°06PA00216,
(5). Article L1111-7 du code de la santé publique et article 6 II de la loi du 17 juillet 1978 aujourd’hui codifié à l’article L311-6 du code des relations entre le public et l’administration.
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