Veille législative et réglementaire protection sociale – octobre 2023
Chaque mois, nous effectuons une veille du journal officiel et du Bulletin officiel. Vous trouverez ici celle du mois de octobre 2023.
Fonction publique
L’absence d’entretien professionnel ouvre droit à l’indemnisation de l’agent public
Un agent public peut-il engager la responsabilité de l’administration quand cette dernière n’a pas procédé aux entretiens professionnels ?
Le tribunal administratif de Rennes répond par l’affirmative. L’affaire portait sur un adjoint technique, affecté au poste chauffeur du président de l’université de Rennes 1, qui n’avait pas été évalué pendant 4 années consécutives.
Le juge rappelle l’article 55 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l’Etat selon lequel « Par dérogation à l’article 17 du titre Ier du statut général, l’appréciation de la valeur professionnelle des fonctionnaires se fonde sur un entretien professionnel annuel conduit par le supérieur hiérarchique direct ».
L’article 2 du décret n° 2010-888 du 28 juillet 2010 relatif aux conditions générales de l’appréciation de la valeur professionnelle des fonctionnaires de l’Etat précise que « Le fonctionnaire bénéficie chaque année d’un entretien professionnel qui donne lieu à compte rendu. / Cet entretien est conduit par le supérieur hiérarchique direct ».
En l’espèce, le fonctionnaire n’avait pas fait l’objet d’entretiens professionnels avec son supérieur hiérarchique pour les années 2014 à 2019, alors même qu’il en a fait la demande à plusieurs reprises. Par suite, il est fondé à soutenir que l’université de Rennes 1 a commis une faute dans la gestion de sa carrière de nature à engager sa responsabilité.
Le juge indemnise l’agent de son préjudice moral résultant de la faute qu’a commise l’université en ne procédant pas à des entretiens professionnels annuels pendant 4 ans, préjudice fixé par le juge à 3 000 euros.
TA Rennes, 6e ch., 12 octobre 2023, n° 2101641
Article émanant du site : https://louislefoyerdecostil.fr/
Marchés publics
Publication de la loi « Industrie verte »
La loi n°2023-973 du 23 octobre 2023 relative à l’industrie verte a été promulguée le 23 octobre 2023 et elle a été publiée au Journal officiel du 24 octobre 2023. Elle reprend sans grande surprise le projet de loi qui avait fait l’objet d’un précédent article. Pour mémoire, l’un de ses objectifs est de permettre une commande publique plus respectueuse de l’environnement.
Pour ce faire, elle accélère la prise en compte de critères environnementaux dans la commande publique. En effet, les marchés publics devront prendre en compte des critères environnementaux dès juillet 2024 (au lieu d’août 2026) pour des produits clés de la décarbonation. La loi rappelle, en outre, qu’une offre « économiquement la plus avantageuse » s’apprécie aussi en fonction de critères qualitatifs, environnementaux ou sociaux.
Elle créé également trois nouveaux motifs d’exclusions des marchés publics que les acheteurs publics pourront choisir d’utiliser ou non. Ces motifs concernent :
- Les entreprises ne satisfaisant pas à l’obligation d’établir un bilan de leurs émissions de gaz à effet de serre ;
- Les entreprises ne respectant pas leurs engagements de publication d’information en matière de durabilité ;
- Et les entreprises de pays tiers mettant en œuvre une concurrence déloyale vis-à-vis de la France.
Enfin, les schémas de promotion des achats publics socialement et écologiquement responsables sont étendus à l’État.
Prévoyance
Maintien de la garantie décès en cas de résiliation d’un contrat collectif de prévoyance
L’arrêt rendu par la deuxième chambre civile de la Cour de cassation le 21 septembre 2023 est relatif au maintien de la garantie décès en cas de résiliation d’un contrat collectif de prévoyance survenant durant une période d’incapacité ou d’invalidité. Il précise le champ d’application de l’article 7-1 de la Loi n°89-1009 du 31 décembre 1989 renforçant les garanties offertes aux personnes assurées contre certains risques (dite « Loi Evin »).
En l’espèce, un employeur souscrit à compter du 1er janvier 2003 un régime de prévoyance auprès d’un premier assureur (la société Monceau) afin de couvrir ses salariés cadres supérieurs au titre des garanties décès et perte totale et irréversible d’autonomie. Les risques incapacité de travail et invalidité sont garantis quant à eux par un autre assureur (société Cri Prévoyance). L’employeur résilie le premier contrat de prévoyance couvrant la garantie décès et perte totale et irréversible d’autonomie à compter du 1er janvier 2013 et en souscrit un nouveau à compter de cette même date, auprès d’un autre assureur (la société Mutuelle générale). Un de ses salariés est placé en arrêt maladie à compter du 10 juin 2011 jusqu’à son décès le 28 octobre 2013.
Les sociétés Monceau et Mutuelle générale refusent d’indemniser son décès. La Cour de cassation condamne le premier assureur (la société Monceau) à prendre en charge les conséquences du décès de l’assuré au titre du contrat de prévoyance.
Les juges rendent leur décision sur le fondement de l’article 7-1 de la loi Evin et mettent en avant le principe suivant : dès lors que le risque décès est garanti collectivement par un employeur dans le cadre d’un contrat de prévoyance, la garantie demeure maintenue et ce, indépendamment de la résiliation du contrat de prévoyance ; sous réserve que le décès intervienne durant une période d’incapacité/invalidité.
La Cour de cassation apporte une précision à ce principe en indiquant que le maintien de la garantie décès demeure acquise, y compris lorsque les risques invalidité/incapacité sont pris en charge par un autre organisme assureur. La garantie présente un caractère autonome, qui ne subordonne pas le maintien de cette garantie à la prise en charge des risques incapacité ou invalidité par le même organisme assureur.
Cass Civ 2ème, 21 septembre 2023 (n°21-22.197) – article 7-1